A Blénod-les-Toul, l'église Saint-Médard conserve l'un des plus beaux tombeaux de la Renaissance,
celui de Hugues des Hazards, natif du village et évêque de Toul de 1506 à 1517.
En 2017, on célèbre les 500 ans de la mort du pontife !
En entrant dans l'église Saint-Médard, édifiée sur ordre de l'évêque de 1506 à 1512,
le tombeau du pontife s'aperçoit immédiatement sur la gauche du chœur.
Réalisé au début du XVIe siècle dans le style gothique et renaissance, ce monument funéraire
aurait été de l’œuvre conjointe Jean Pèlerin, de Mansuy Gauvin
et d'un artiste italien inconnu.
Jacques Baudoin, auteur d'un ouvrage sur la sculpture flamboyante en Champagne
et Lorraine, imagine que l'auteur du tombeau pourrait être Pierre Wiriot.
Ce tombeau, jadis polychrome, qui mesure 4 m de haut sur 3,40 m de large,
se décompose en trois parties :
- la partie supérieure présente les Arts libéraux
- la partie centrale affiche l'évêque de Toul étendu au-dessus d'une inscription
- la partie inférieure est occupée par des pleurants
L'encadrement du monument funéraire se compose de pilastres, rinceaux, imposte, de colonnes
à tores en hélice se terminant par des chapiteaux pseudo-corinthiens, surmontés des armes
parlantes de Hugues des Hazards : "D'azur à la croix d'argent cantonnée
de quatre dés du même à un point de sable".
Allongé, coiffé de la mitre et tenant sur son flanc gauche la crosse épiscopale, Hugues des Hazards
est vêtu des habits épiscopaux et portant le surhuméral, ornement liturgique
propre aux prélats lorrains, toulois et de région de l'empire germanique.
Sous le gisant, une longue tablette de cuivre, haute de 23 cm, affiche un long texte en latin
gravé en relief aux lettres dorées et retraçant la vie et les mérites du prélat.
L'abbé Guillaume en a fait la traduction, en 1843 :
« Hugues, de l'ancienne et honorable famille des Hazards, né à Blénod, y fut initié, dès son bas âge,
aux premiers éléments des belles-lettres. Ayant ensuite acquis à Toul, à Metz, à Dijon, les meilleurs
principes de la Grammaire, il se rendit à Sienne où, pendant sept années et aux frais de ses parents,
il donna tous ses soins à l'étude de l'un et de l'autre Droit. Après de remarquables études, décoré du
titre de docteur, il alla à Rome pour y exercer la charge d'avocat. Mandé par l'illustrissime roi de Sicile,
duc de Lorraine et de Bar, René II, il revint en Lorraine et fut élevé à la dignité de Prévot de Saint-
Georges de Nancy. Hugues, si recommandable par ses vertus religieuses et sociales, si dévoué aux
intérêts de son pays, fut créé, par le même roi de Sicile, président des États de Lorraine et aussi
président de son Conseil. Il montra envers les puissants et les princes, dans les différentes légations
dont il fut chargé, une rare prudence, une bonne foi singulière, un tact particulier. Le doyenné de la
basilique de Metz étant venu à vaquer, les Chanoines, à l'unanimité, le firent leur doyen. Ensuite, Olry
de Blâmont, évêque de Toul, étant mort, les chanoines de cette Église, d'une voix unanime et comme
inspirés par le souffle divin, l'élurent, quoique absent, pour premier pasteur. Le pape Jules II confirma
*son élection et lui donna l'abbaye de Saint-Mansuy, alors vacante. Il administra son diocèse et sa
communauté avec impartialité, piété, prudence et justice, et, quoiqu'il fût appliqué aux affaires les plus
difficiles du pays, on ne le vit que rarement ne pas embellir de sa vénérable présence, aux grandes
solennités de l'année, les lieux soumis à son autorité. Le très-illustre duc Antoine, fils du roi René et son
légitime héritier après la mort de son père, environna le pontife des Hazards d'une égale bienveillance
et le combla d'honneurs. Après avoir élevé, depuis les fondements, ce magnifique temple de St.-Médard,
la citadelle et le palais de Blénod ; après avoir réparé presque la moitié de l'abbaye de St.-Mansuy,
réparé et doté plusieurs chapelles, renouvelé les ponts en plusieurs endroits de son diocèse, ménagé,
du pied des montagnes et par les conduits souterrains, plusieurs fontaines, et formé des réservoirs à
l'usage des hommes et des animaux, il ordonna que, chaque année, son obit fût célébré avec une
solennité décente, dans l'Église de St.-Gengoult de Toul et dans cette Église de Saint-Médard. Enfin,
le 14e jour du mois d'octobre de l'an 1517, le 63e de son âge et de son épiscopat le onzième, au grand
regret de tous, il quitta la vie et reçut la sépulture, en présence d'une foule imposante de personnes,
dans cette Église de Saint-Médard, que, plein de souvenirs pour son pays natal, il avait,
de son vivant, fait construire avec bonheur. Priez pour lui. »
Le lion allongé aux pieds de Hugues des Hazards
La partie supérieure du tombeau présente les Arts libéraux, le trivium et le quadrivium,
dans l’ordre devenu traditionnel :
- La Grammaire
-La Dialectique
-La Rhétorique
-L'Arithmétique
-La Musique
-La Géométrie
- L'Astronomie
La Grammaire est représentée enveloppée d'un grand manteau à capuchon, la paenula,
sorte pèlerine à capuche ; sa main gauche tient une ardoise où sont tracées les douze
premières lettres de l'alphabet ; et sa main droite lève un rameau
et une lime pour en montrer la rigueur.
La Dialectique est figurée portant une robe longue sur laquelle figure une
tunique descendant jusqu'aux genoux et bordée d'un
rang de sonnailles qui alternent
avec des ornements représentant des
grenades ; sur la tunique est passée l'éphod.
Elle porte le caducée enroulé sur son bras droit et un carquois pend sur sa gauche ;
ce dernier rempli de flèches rappelle les arguments du débat.
La Rhétorique semble tenir
dans la main droite une couronne, qu'elle veut offrir comme
insigne de
victoire. A la ceinture pend une bourse en forme d'escarcelle,
allusion peut-être au profit qu’apporte l’éloquence.
L'Arithmétique est vêtue de la modeste
pænula, comme la Grammaire, parce-qu'elle n'est
pas une science
supérieur. Elle tient à la main droite une ardoise renversée
qui porte
les nombres 1 à 10, et après le 10, une croix.
La Musique est jeune femme élégante, à la chevelure
abondante et fleurie, au costume richement
orné de broderie et d'entre-deux. Elle souffle dans une flûte, et avec ses pieds sont disposés
un petit orgue, un
luth, un cygne qui émerge d'une vague ondoyante.
La Géométrie affiche une longue robe bouffante à manche courtes, serrée par une ceinture ;
la main gauche supporte un
tableau où sont dessinées les figures fondamentales de la
géométrie
plane : triangle, carré, cercle ; l'autre main tient la baguette de
démonstration ;
elle a sous le bras une équerre ; un fil à plomb pend à
sa ceinture.
L'Astronomie, ailée, est vêtue d'une robe bordée de riches
broderies et d'un manteau comparable
à celui de la Rhétorique,
l'Astronomie, debout sur le croissant de Lune, couronnée d'étoiles.
Elle tient de sa main gauche un livre à la couverture ornée du soleil.
Au lieu d'un ciel étoilé,
on remarque une sphère armillaire où sont tracés les orbes des étoiles,
le cercle de l'écliptique et un méridien terrestre, qui symbolisent l'Univers.
Les pleurants, placés deux par deux sous une arcature en plein cintre, affichent un phylactère
avec la devise de l'évêque : "NASCI LABORARE MORI"
Chapiteaux renaissance d'inspiration corinthienne ; sur celui de gauche, on aperçoit un dragon
Ces écus étaient jadis peints des armoiries d'Hugues des Hazards
Décor renaissance à vases, feuillages et fleurs
Deux salamandres
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