Ce petit village, situé dans la vallée du Mouzon au sud de Neufchâteau, recèle un vrai trésor : le portail roman de l'église paroissiale Saint-Martin. Il figure, avec ceux de la cathédrale de Verdun, des églises de Laître-sous-Amance et de Vomécourt-sur-Madon, parmi les plus beaux exemples de portails romans historiés de Lorraine.
Ce portail, placé en façade d'une église reconstruite au XIXe siècle, est le dernier témoin architectural majeur de l'ancien sanctuaire roman.
Peu d'éléments historiques nous permettent de comprendre pourquoi l'église Saint-Martin fut dotée d'un tel portail ! D'après le chroniqueur Grégoire de Tours, dans son Historia Francorum, une rencontre aurait eu lieu à Pompierre ("Pontem quem Petrium vocitant"), en 577, entre le roi de Bourgogne, Gontran, et son neveu et roi d'Austrasie, Childebert. Existait-il alors une première église ou chapelle ? Probablement !
Selon la tradition (discutable !), au XIIe siècle, le duc de Lorraine, pour commémorer la rencontre qui avait eu lieu en 577, demanda qu'un superbe portail soit prévu sur la nouvelle église romane.
Le Pouillé de Toul (1402) nous apprend aussi que la paroisse de Pompierre était comprise dans le doyenné de Bourmont et que le curé était nommé par les chanoines de la collégiale meusienne Notre-Dame de Ligny-en-Barrois.
Le Pouillé de Toul (1402) nous apprend aussi que la paroisse de Pompierre était comprise dans le doyenné de Bourmont et que le curé était nommé par les chanoines de la collégiale meusienne Notre-Dame de Ligny-en-Barrois.
Au milieu du XIXe siècle, l'église était dans un si piteux état que la commune de Pompierre décida de la détruire, en conservant toutefois le portail roman, qui sera démonté pierre par pierre afin d'être replacer sur la nouvelle église. A l'origine, ce portail roman se trouvait sur le bas-côté nord de l'ancien sanctuaire, dont le gros œuvre était apparemment roman avec des ajouts possibles pendant la période gothique (baies). Un dessin conservé à la Bibliothèque Nationale de France et exécuté par F. A. Pernot, en 1795, montre la disposition du portail sur le bas-côté nord.
La destruction de l'ancienne église vétuste intervint donc entre 1854 et 1859. Puis, en 1860, la nouvelle église paroissiale est reconstruite à un autre endroit disposant de davantage de place. Le portail est alors remonté, non plus sur l'un des bas-côtés, mais en façade.
Aujourd'hui, ce chef-d'œuvre de l'art roman est protégé par un appentis de bois.
L'église néo-romane n'ayant qu'un intérêt limité, nous nous intéresserons au portail roman. L'influence de la Bourgogne, terre réputée pour ses nombreuses églises romanes, est sans conteste. Remontant à la fin XIIe siècle, le portail historié de Pompierre n'a cependant par le rendu artistique des portails romans bourguignons de Vézelay ou d'Autun. Mais, l'artiste qui a sculpté ce joyau, a quand même tenté de proposer une œuvre se rapprochant de ses modèles bourguignons même si l'on décèle quelques maladresses.
Lorsqu'on découvre le portail de Pompierre pour la première fois, on est saisi par sa richesse. et sa beauté artistique. Sous des voussures, toutes différentes (en zig-zag, à rainures et à feuillages), le tympan et son linteau historiés, supportés par des culots anthropomorphes, s'offrent à nous. Ici, le thème central du tympan est l'Adoration des Mages. En effet, sous des arcades en plein cintre romanes constituées de colonnes finement ouvragées (octogonales, quadruples etc) et de chapiteaux à feuillages, se succèdent les trois Rois Mages apportant des présents à l'Enfant Jésus alors assis sur les genoux de sa mère, la Sainte Vierge. A l'extrémité gauche, un ange annonce aux bergers la naissance du Christ, évènement précédent la venue des Rois Mages. La partie supérieure du tympan, montre, de gauche à droite, le Massacre des Innocents sur ordre du roi Hérode, puis la Fuite hors d'Égypte de Jésus et de ses parents et enfin trois personnages difficilement identifiables (peut-être l'Ange Gabriel, un prêtre et un autre personnage !)
Qu'en est-il du linteau ? L'artiste a choisit pour thème, l'entrée triomphale du Christ à Jérusalem. On voit donc, de droite à gauche, un cortège composé du Christ assis sur son ânesse (avec son ânon) suivi de quatre apôtres (dont Saint-Pierre) qui est accueilli par les habitants de Jérusalem venant de sortir de la cité avec des rameaux (ou palmes) à la main. A l'arrière des Hiérosolymitains, la ville de Jérusalem est représentée crénelée avec d'autres habitants juchés sur les remparts palmes en main. Puis, coincée entre la ville de Jérusalem et les voussures, la Vierge donnant le sein à l'Enfant Jésus occupe l'espace.
Chacun des piédroits encadrant la porte d'entrée et supportant les voussures sont ici constitués de trois colonnes (à décor de vannerie, de feuillages et d'entrelacs, ou lisses) surmontées de chapiteaux sculptés (visages et corps de monstres sur deux ; feuillages sur un ; oiseaux sur un autre) et historiés (les deux premiers chapiteaux du piédroit de gauche rappellent la Résurrection de Lazare par le Christ sous les yeux de témoins, Marie et Marthe sœurs du ressuscité et les apôtres dont Saint-Pierre). A la base de certaines colonnes, on devine des salamandres ou sirènes enlacées, des personnages faisant la ronde et des corps de lion sans tête.
Je vous laisse découvrir ce portail à travers des photos et d'autres commentaires...
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Vous pouvez agrandir les vignettes en cliquant dessus !
Vous pouvez agrandir les vignettes en cliquant dessus !
L'église néo-romane avec le portail roman en façade
Le tympan et le linteau reposant sur des culots anthropomorphes sous des voussures ouvragées retombant sur des chapiteaux historiés, à têtes de monstres, à corps de volatiles et à feuillages.
Le tympan avec l'Adoration des Mages et le linteau, en dessous, avec
l'entrée triomphale du Christ à Jérusalem (Les Rameaux)
l'entrée triomphale du Christ à Jérusalem (Les Rameaux)
Tympan - L'Adoration des Mages : de droite à gauche,
on voit d'abord Balthazar avec un ciboire rempli de myrrhe
(résine provenant du balsamier servant à fortifier et protéger l'Enfant Jésus) ;
vient ensuite Gaspard tenant une corne d'abondance remplie d'or
(symbole royal de richesse avec reconnaissance de la nature divine de Jésus) ;
et enfin Melchior avec un ciboire garni d'encens (symbole de spiritualité).
Tympan - Balthazar offrant son ciboire plein de myrrhe à l'Enfant Jésus alors assis
sur les genoux de sa mère, la Sainte Vierge.
sur les genoux de sa mère, la Sainte Vierge.
Tympan - Balthazar avec le ciboire rempli de myrrhe
Tympan - Gaspard tenant une corne d'abondance remplie d'or.
Tympan - Melchior avec un ciboire plein d'encens
Tympan - La Vierge et l'Enfant Jésus
Tympan - L'Annonce aux bergers de la naissance du Christ. Un ange l'index dirigé
vers les bergers leur annonce la venue au monde de Jésus.
Les Trois bergers de la scène sont ici représentés avec leur bâton et leur mouton.
vers les bergers leur annonce la venue au monde de Jésus.
Les Trois bergers de la scène sont ici représentés avec leur bâton et leur mouton.
Linteau - Vierge à l'Enfant, situé à l'arrière de la ville de Jérusalem,
qui s'apprête à accueillir le Christ.
qui s'apprête à accueillir le Christ.
Linteau - Vierge donnant le sein à l'Enfant Jésus
Linteau - Personnages sortant de Jérusalem des palmes à la main pour aller au devant du Christ.
Des enfants, juchés dans un arbre, coupent des branches pour les jeter sur le passage du fils de Dieu.
Des enfants, juchés dans un arbre, coupent des branches pour les jeter sur le passage du fils de Dieu.
Et enfin, d'autres, les plus près du Christ, étendent leurs vêtements devant lui, en signe de révérence.
Linteau- Visages de quatre des six personnages tenant des palmes
Linteau - Deux enfants étendant leurs vêtements devant Jésus
Linteau - Le Christ couronné assis sur son ânesse arrive à Jérusalem avec la main droite levée
en signe de bénédiction et la main gauche soutenant un livre, celui de la nouvelle loi.
en signe de bénédiction et la main gauche soutenant un livre, celui de la nouvelle loi.
Il est suivi par quatre apôtres tenant des palmes et un ânon. Le premier des apôtres est
Saint-Pierre reconnaissable avec la clef qu'il serre contre lui.
Saint-Pierre reconnaissable avec la clef qu'il serre contre lui.
Linteau - Le Christ bénissant avec sa couronne royale
Tympan - La partie supérieure : Le massacre des Innocents sur les ordres d'Hérode,
ici sur son trône. Deux sbires à la solde du roi, s'apprêtent à couper la tête de
deux innocents sous les yeux de témoins situés à l'arrière.
ici sur son trône. Deux sbires à la solde du roi, s'apprêtent à couper la tête de
deux innocents sous les yeux de témoins situés à l'arrière.
Tympan - La partie supérieure : La fuite en Égypte de la Sainte-Famille avec Joseph en tête,
suivi de Marie et Jésus juché sur un âne et derrière une femme portant des bagages.
Tympan - La partie supérieure : L'Ange Gabriel (?), un prêtre et un autre personnage
Piédroit de gauche - Colonnes à chapiteaux
Console de gauche en forme de personnage barbu à bonnet d'âne et tirant la langue
Piédroit de gauche - Chapiteaux supportant les voussures
Piédroit de gauche - Chapiteau avec têtes de monstres de la première colonne
Piédroit de gauche - Chapiteau au décor floral de la colonne centrale
Piédroit de gauche - Chapiteau décoré de trois oiseaux (aigles ?) de la troisième colonne.
Piédroit de gauche - Deux salamandres ou sirènes enlacées soutenant la première colonne.
Piédroit de gauche - Un corps de lion étêté supportant la troisième colonne.
Piédroit de droite - Colonnes à chapiteaux historiés
Piédroit de droite - Les chapiteaux historiés et à têtes de monstres
Piédroit de droite - Chapiteau de la première colonne illustrant
la Résurrection de Lazare par le Christ
la Résurrection de Lazare par le Christ
Piédroit de droite - Christ bénissant Lazare, le ressuscité
Piédroit de droite - Les témoins (dont Marie et Marthe, sœurs de Lazare)
de la Résurrection de Lazare
de la Résurrection de Lazare
Piédroit de droite - Chapiteau de la colonne centrale figurant quatre apôtres
dont Saint-Pierre avec sa clef, tout à gauche.
dont Saint-Pierre avec sa clef, tout à gauche.
Piédroit de droite - Chapiteau de la colonne centrale avec Saint-Pierre à gauche.
Piédroit de droite - Chapiteau avec des têtes de monstres de la troisième colonne.
Piédroit de gauche - Colonne à décor de feuillage et volutes
Piédroit de droite Colonne à décor de feuillages et d'entrelacs
Piédroit de gauche - Colonnes à décor de tressage
Les voussures décorées de feuillages, de zig-zag et de rainures
Malgré les restaurations nécessaires, qui auront l'avantage de lui donner un coup d'éclat,
le portail de Pompierre est l'un des fleurons de l'art roman en Lorraine.
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Localisation de Pompierre dans les Vosges
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Toujours aussi excellents vos "reportages", bien documentés et photos de qualités. Merci de mettre aussi bien en valeur notre patrimoine !
RépondreSupprimerMerci à vous d'être venu aujourd'hui admirer le superbe portail roman de Pompierre qui mériterait une restauration pour en retirer la crasse !
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