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dimanche 5 janvier 2025

LA BATAILLE DE NANCY - 5 janvier 1477

LA BATAILLE DE NANCY - 5 janvier 1477 
Une victoire fondatrice pour le duché de Lorraine 

Dès l’accession au duché de Lorraine de René II le 2 août 1473, Charles de Bourgogne contesta
cette principauté, rêvant de l’incorporer à son patrimoine. La bataille qui s’ensuivit, régla
définitivement la question des prétentions bourguignonnes.


"La bataille de Nancy, 5 janvier 1477"
Miniature du manuscrit "La Nancéide" de Pierre de Blarru. 1518. (Musée Lorrain de Nancy)
A gauche, les Suisses et les Lorrains , René II en tête chargent les Bourguignons.
Au dessus, le duc de Bourgogne et son cheval sont morts.
Dans le coin inférieur droit, Campo Basso massacre les Bourguignons en fuite.
Dans le coin inférieur gauche, les forces alliées ont capturé les canons bourguignons
et les ont tournés vers l'ennemi. En plein champ, c'est la bataille qui fait rage.
Enfin, en haut, la ville de Nancy


Charles le Hardi (l’appellation de Téméraire est tardive) obtint avec le traité signé à Nancy le 15 octobre 1473 le droit de placer des garnisons bourguignonnes dans plusieurs forteresses lorraines lui permettant de relier toutes ses terres (la Bourgogne, le Charolais, la vallée de la Flandre, le Brabant, le Hainaut, l’Artois, la Picardie, le Luxembourg et le comté de Thionville.

Mécontent, le duc de Lorraine s’employa à harceler les troupes de Charles par des embuscades.


Déterminé, Charles mit le siège devant Nancy. Les bombardes bourguignonnes ébranlant petit à petit les remparts, René II préféra ordonner le 25 novembre aux 2 200 Allemands et aux 500 Gascons présents à ses côtés de quitter Nancy ; ils le feront le 27.


"Charles le Téméraire assiégeant Nancy, 22 octobre 1476"
 Enluminure tirée de "La Chronique de Lucerne" (1511-1513)
écrite par le chroniqueur Diebold Schilling der Jüngere (1460-1515) 
(Bibliothèque Centrale de Lucerne)


Nancy aux mains de Charles, Jean de Rubempré, seigneur de Bièvre, devint gouverneur de la Lorraine et chef de la garnison bourguignonne.

La révolte de René II de Lorraine 

Profitant du départ de Charles de Bourgogne le 14 février 1476 pour la Suisse où il voulait soumettre les « vachers » qui avaient pris plusieurs de ses châteaux, René II assiégea et reprit la cité ducale.


La nouvelle de cette prise indisposa Charles qui marcha en direction de la Lorraine avec 10 à 12 000 hommes. A Pont-à-Mousson, le combat faillit s’engager entre les deux factions mais René II préféra se retirer estimant son infériorité numérique trop défavorable.


Le duc de Bourgogne, qui avait accordé sa confiance au condottiere Napolitain Cola II de Monteforte, comte Campo Basso, un traître vendu au roi de France et au duc de Lorraine, fut abandonné par ce dernier.


Charles installa son quartier général à la commanderie Saint-Jean et ordonna le siège de Nancy dès le 22 octobre 1476. Entre temps, le duc de Lorraine avait quitté subrepticement sa capitale pour aller chercher de l’aide auprès des cantons suisses et des Alsaciens. La garnison lorraine et les habitants de Nancy promirent de tenir aussi longtemps que possible.


Gaston Save, La tente de Charles Le Téméraire à la Commanderie Saint Jean, 1896 
© Musée lorrain, Nancy


Arrivé à Bâle, le 2 novembre 1476, René II parvint à convaincre les cantons suisses de l’aider dans cette tâche ardue de recouvrer son duché. Il se porta ensuite à Berne et à Lucerne où il leur promit une forte somme. Le maître d’hôtel ducal, Suffren de Baschi fut alors chargé de se rendre à Nancy pour prévenir la garnison et ses habitants de la venue imminente du duc mais il fut capturé et pendu par les Bourguignons (en représailles René II demanda l’exécution d’une centaine de prisonniers).

Poursuivant sa campagne de recrutement, le duc de Lorraine arriva en Alsace pour convaincre les Alsaciens du bien fondé de sa requête. Guillaume Herter de Strasbourg accepta volontiers de l’aider. Pendant ce temps là, les Suisses se concentrèrent à Bâle avant de traverser l’Alsace où ils se livrèrent à de vils pillages. Oswald de Thierstein régla la somme de 2 500 florins, première solde promises aux combattants suisses et alsaciens, afin de s’assurer du soutien réel des Suisses.

L’assaut bourguignon du 26 décembre 1476 fut très coûteux en hommes, Charles perdit un tiers de ses effectifs. Le froid et la neige causèrent également la mort de 400 Bourguignons dans la nuit de Noël. Puis comme prévu, le 1er janvier, le comte de Campo Basso quitta le camp du duc Charles avec sa condotta prétextant d’aller au devant des renforts venant de Flandre ; en réalité, le duc de Lorraine lui avait garanti la seigneurie de Commercy en échange de son aide.

"L'armée lorraine quittant Saint-Nicolas de Port"
 Enluminure tirée de "La Chronique de Lucerne" (1511-1513)
écrite par le chroniqueur Diebold Schilling der Jüngere (1460-1515) 
(Bibliothèque Centrale de Lucerne) 


Le 3 janvier 1477, René II passa à Croismare et le 4 arriva à Saint-Nicolas-de-Port, point de ralliement des combattants, dans la matinée. Les Suisses, les Allemands et les Alsaciens y parvinrent dans l’après-midi. Une lanterne fut placée sur le clocher de l'église de Saint-Nicolas (pas la basilique que l'on connaît aujourd'hui) pour signaler aux Nancéiens l’arrivée imminente de leur duc.

 Arbalétrier lorrain. Reconstitution de la Compagnie Médiévale
"Historica Tempus" de Ludres. Janvier 2017.

Les forces en présence et le champ de bataille 

Les sources bourguignonnes d’Olivier de la Marche et de Jean de Margny apportent de maigres renseignements. Par contre, du côté des alliés, les informations sont plus loquaces avec notamment les récits vivants des Lucernois Peterman Etterlin et Diebold Schilling et de Pierre de Blarru, personnages ayant prit part à la bataille. Enfin, la chronique de Lorraine, source à ne pas négliger, est néanmoins à considérer avec prudence.

La composition des deux armées était hétéroclite. En effet, René II avait réussit à réunir près de 20 000 combattants (dans « La vraye déclaration du fait et conduite de la bataille de Nancy », René II indiqua que son armée comprenait de 19 à 20 000 hommes) venant de Suisse, d’Alsace et d’ailleurs ; Charles de Bourgogne en rassembla entre 6 000 et 10 000 dont des Hollandais, Savoyards, Anglais et mercenaires italiens. 
 
 Combattant lorrain. Reconstitution de la Compagnie Médiévale
"Historica Tempus" de Ludres. Janvier 2017.

Les coalisés 

Les contingents de cavaliers lorrains étaient sous le commandement de René II et de son maréchal le comte Oswald 1er de Thierstein. Les Suisses, qui composaient le noyau principal du duc de Lorraine avec 6 000 volontaires (piquiers, hallebardiers et couleuvriniers), venaient de Zurich (2 430 hommes), de Lucerne (1 200 hommes), de Berne (1 087 hommes) et d’autres ortes (Schaffouse, Soleure, Appenzell, Fribourg, Unterwald et Uri). Le lucernois Henrich Hassfurter, le zurichois Hans Waldmann et le bernois Brandolfe de Stein en étaient les principaux capitaines.

Combattants lorrains. Reconstitution de la Compagnie Médiévale
"La Massenie de Saint-Michel" de Saint-Mihiel. Blâmont 7 juillet 2003.

Les Alsaciens (de Colmar et de Strasbourg), sous les ordres du strasbourgeois Guillaume Herter de Hertenegg et les Bâlois fournirent chacun un contingent d’infanterie. L’abbé de Saint-Gall, le comte Eberhard VI de Wurtemberg et les cités de Schaffhouse et de Rothweil envoyèrent des cavaliers. Au dessus de cette armée, flottaient les bannières et pennons des évêques de Bâle et de Strasbourg ainsi que du duc d’Autriche, Sigismond.



Combattants Suisses, couleuvriniers, piquiers et hallebardiers.
Pierre de Blarru. La Nancéide
Gravure sur bois. 151. Imprimé à Saint-Nicolas-de-Port par Jean Jacobi
(Bibliothèque municipale de Besançon)


René II connaissait bien les Suisses et les Strasbourgeois pour avoir combattu à leurs côtés à Morat avec 250 cavaliers. Il fut même adoubé à cette occasion par Guillaume Herter de Hertenegg dans la clairière de Lurtingen le 22 juin à l’âge de 20 ans.

Le condottiere napolitain Cola II de Monteforte, accompagné de ses fils, de son frère Angelo et de son cousin Jean apporta son aide à René II en le rejoignant avec 300 cavaliers. 


Doloire (XVe siècle)
Doloire et fléau d'arme à une boule hérissée de pointes (XVe siècle)
(Collection Mr Crouzier, association Connaissance et Renaissance de la basilique de Saint-Nicolas-de-Port)
Fléau d'arme à une boule hérissée de pointes (XVe siècle)


Les Bourguignons 

L’armée du duc de Bourgogne offrait une bien piètre image depuis les cinglantes défaites de Grandson et de Morat en mars et juin 1476. Il paraissait donc normal que Charles de Bourgogne ne put constituer une armée à la hauteur de ses ambitions. Nous savons que le 8 décembre 1476, environ 10 000 hommes furent payés pour leur service par le prince mais les conditions météorologiques et les conflits larvés entamèrent ce potentiel militaire. A ses côtés se trouvaient entre autres son frère le Grand-Bâtard Antoine, Philippe de Croy comte de Chimay, Engelberg II comte de Nassau-Dillenburg, Frédéric de Florsheim comte de Bade, Philippe de Hochberg comte de Neufchâtel et Olivier de la Marche.

 Bataille de Nancy - Les Bourguignons sous les murs de la commanderie Saint-Jean
(Diorama évoquant la bataille, réalisée par Mr Richard)

Deux corps de cavalerie étaient commandés par Josse de Lalaing et le condottiere napolitain Jacques de Galeotto. Charles avait prévu des pièces d’artillerie. Des archers anglais montés, des contingents savoyards et hollandais complétaient le dispositif.


Salade d'archer, camail et salade allemande à visière (XVe siècle)
 Salade d'archer, camail et salade allemande à visière (XVe siècle)
 (Collection Mr Crouzier, association Connaissance et Renaissance de la basilique de Saint-Nicolas-de-Port
et Mr Guichou, association Historica Tempus de Ludres)
Salade d'archer (XVe siècle)


Une bataille perdue d’avance 

Ce 5 janvier 1477, il neigeait. Après la lecture de la Cyropédie, Charles de Bourgogne rassembla ses troupes tôt dans la matinée. Il enfourcha son cheval noir dénommé Moreau et selon les récits de l’époque, lorsque son écuyer lui tendit son casque, le cimier au lion d’or le surmontant s’en détacha et tomba à terre ; le duc désabusé aurait prononcé "Hoc est signum Dei "(c’est un présage de Dieu).
  
LA BATAILLE DE NANCY - 5 janvier 1477
Plus ancienne représentation de la Bataille de Nancy
(Imprimée à Strasbourg en 1477) 

Il redoubla alors d’ardeur, se plaça au centre avec son artillerie (à l’emplacement exact de l’actuelle église Notre-Dame-de-Bonsecours) devant lui sur la route venant de Jarville, les archers anglais derrière, et demanda à Josse de Lalaing et ses cavaliers de prendre position sur sa droite et à Jacques Galeotto de s’installer avec ses hommes sur sa gauche. La Meurthe protégeait le flanc gauche et le bois de Saurupt le flanc droit.


Vous pouvez agrandir cette vignette en cliquant dessus !


En face, les coalisés venaient de Saint-Nicolas-de-Port, qu’ils avaient quitté à huit heures du matin. Ils s’arrêtèrent un peu avant le village de Jarville afin de déterminer le plan de bataille. Deux déserteurs Bourguignons capturés révélèrent à René II et à ses alliés la disposition des troupes du Téméraire ainsi que la configuration du terrain. Pendant toute la délibération, la neige tombait à gros flocons. Prendre le flanc droit tenu par la cavalerie de Lalaing était la clef de cette bataille.

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L’ordre de marche fut alors décidé. René II remonta sur sa jument grise La Dame puis se plaça en tête de l’armée avec ses cavaliers lorrains. Le comte de Campo Basso fut envoyé à Bouxières-aux-Dames pour garder le pont et empêcher la fuite des Bourguignons par la route principale menant à Metz.


Vous pouvez agrandir cette vignette en cliquant dessus !


L’avant-garde (3 ou 400 cavaliers lorrains et français) commandée par le seigneur de Rosières-aux-Salines, Vautrin Wisse, emprunta alors le petit sentier contournant le bois de Saurupt, traversa le ruisseau de Heillecourt, passa à proximité de la ferme de la Malgrange, franchit le ruisseau de Jarville, coupa la route menant à Vandoeuvre, effaça le ruisseau de la Madeleine, progressa sous le couvert du bois de Saurupt et s’arrêta à la lisière de ce dernier à un kilomètre des positions bourguignonnes.

LA BATAILLE DE NANCY - 5 janvier 1477
 Lorrains achevant les Bourguignons

 Les piquiers, hallebardiers et couleuvriniers suisses ; René II et ses lieutenants Oswald de Thierstein en tête lui avaient emboîté le pas. Les combattants étaient éreintés après cette manoeuvre de contournement par ce froid glacial et cette neige abondante. En ce début d’après-midi, Charles de Bourgogne ne se doutait pas de la présence d’une telle force (400 cavaliers, 4000 couleuvriniers, 4000 piquiers, 3000 hallebardiers et 2000 hommes d’armes) sur son flanc droit, force prête à bondir.
 
 Le duc René II au cœur de la bataille, à cheval et paré de la croix de Jérusalem
(dessin de Pierre Joubert)


A 13 heures, la neige cessa de tomber et le soleil apparut; l’ordre d’attaquer fut alors donné. Les Suisses firent alors souffler trois longs et lugubres coups de trompe (cantons d’Uri et d’Unterwald !), signal de l’assaut. La surprise fut totale, les cavaliers de Josse de Lalaing submergés, reculèrent. 

L’artillerie de Charles impuissante, ne put refouler ce flux de combattants suisses, lorrains, alsaciens et allemands. Les couleuvriniers suisses avancèrent en déchargeant toutes leurs munitions, suivis des hallebardiers et des piquiers qui embrochèrent les Bourguignons encore vivants.

LA BATAILLE DE NANCY - 5 janvier 1477
 Bataille de Nancy - Les Suisses s'emparent des canons bourguignons.
(Diorama évoquant la bataille, réalisée par Mr Richard)

L’armée restée en face du Téméraire passa aussi à l’attaque. L’artillerie capturée fut retournée contre les Bourguignons. Les archers anglais infligèrent des pertes aux alliés mais rapidement, ils cédèrent face à cette marée humaine. Jacques de Galeotto, estropié, se retira en traversant au gué de Tomblaine puis s’enfuit vers le Nord.

La bataille de Nancy - Charles le Téméraire en plein combat
Enluminure tirée de "La Chronique de Lucerne" (1511-1513)
 écrite par le chroniqueur Diebold Schilling der Jüngere (1460-1515)
(Bibliothèque Centrale de Lucerne)


Le duc de Bourgogne et ses hommes assaillis de toute part se replièrent vers la commanderie Saint-Jean et vers Bouxières-aux-Dames. Rattrapés par les Suisses et les Lorrains, ils furent achevés près de l’étang Saint-Jean. Charles, blessé, s’écroula. Claude de Bauzemont, châtelain de Saint-Dié, acheva le Grand Duc d’un coup de hache sur la tête.


Bataille de Nancy - René II de Lorraine s'approchant des Bourguignons.
(Diorama évoquant la bataille, réalisée par Mr Richard)


René II et ses alliés font une entrée triomphale à Nancy. 

En fin de journée, René II demanda au condottiere s’il n’avait pas vu le duc de Bourgogne ; la réponse fut négative. Le duc de Lorraine fit quand même son entrée dans sa chère capitale. Mais, son esprit était accaparé par Charles, où était-il, avait-il fui ou était-il mort ?

Louis Robert - Entrée dans Nancy de René II victorieux. 1895
(Collection Musée Lorrain - Nancy)

Au cours du combat, Jean Max von Eckwersheim captura le comte de Nassau, Jean de Bidos, seigneur de Pont-Saint-Vincent, Antoine le Grand Bâtard et Guillaume de Rappolstein le comte de Chimay.

 D’après un chroniqueur suisse, 5 699 cadavres de Bourguignons gisaient dans la plaine nancéienne ; chiffre incluant vraisemblablement les combattants morts lors des sièges de Nancy. La petite armée de Charles perdit en tout cas les 2/3 de ses effectifs si l’on se réfère au nombre de compagnies d’archers anglais rentrés dans leur patrie en janvier et février 1477. Cette défaite fut cuisante et coûteuse en hommes.


Dague et éperon à ailette (XVe siècle) trouvés près de l'étang Saint-Jean 
(Conservés au Musée Lorrain de Nancy)


Les honneurs rendus au Téméraire 

Le lundi 6 janvier 1477, René II obnubilé par le Téméraire partit à sa recherche, interrogea des prisonniers, envoya des hommes arpenter la Lorraine et même au-delà. La prospection demeurait infructueuse quand le soir venu le Napolitain Cola de Montforte lui amena un jeune page romain, Baptiste Colonna. Celui-ci lui annonça qu’il était au service du prince tant recherché et qu’il l’avait vu s’effondrer à proximité de l’étang Saint-Jean.

Le lendemain, mardi 7, le page mena le duc de Lorraine dans le pré de Virelay non loin de l’étang Saint-Jean où il lui présenta son maître, étendu parmi d’autres cadavres. Il était nu, dépouillé de ses atours, la tête prise dans la glace, une joue dévorée par un loup et le corps piétiné par des chevaux.

http://patrimoine-de-lorraine.blogspot.fr/2017/03/tableau-demile-chepfer-le-corps-du.html
 Peinture d'Emile Chepfer - Le corps du Téméraire retrouvé près de l'étang Saint-Jean
(à voir en détails en cliquant ici !)



Le médecin portugais du Grand Duc, Lopo da Guarda fut mandé. Il fit une inspection rigoureuse de son prince, releva qu’il avait le crâne fendu par une hache, deux plaies profondes dans le bas des reins et les cuisses dues à des coups de piques ; puis le reconnut grâce à six signes : des dents manquaient à sa mâchoire, une cicatrice au cou (résultat d’un coup de lance à la bataille de Montlhéry), la trace d’un furoncle à l’épaule, des ongles très courts, un gros orteil au pied gauche, un ongle incarné et la trace d’une fistule au testicule droit.

Formellement identifié, la dépouille de Charles fut portée dans une maison de Nancy, chez Georges Marquiez ; son corps fut lavé puis revêtu d’une longue robe brodée et la tête couverte d’une toque rouge.

 Le duc de Lorraine, René II devant la dépouille
du duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, le 12 janvier 1477.
Chronique de Louis XI, dite Chronique scandaleuse (1498-1502, par Jean de Roye)

Le samedi 11 janvier, l’embaumement du corps eut lieu et le lendemain, René II fit célébrer une messe à 6 heures du matin en la collégiale Saint-Georges. Enfin, le corps du Téméraire et celui de Jean de Rubempré furent inhumés dans le transept.

 Dépouille du duc de Bourgogne 
Pierre de Blarru. La Nancéide
Gravure sur bois. 151. Imprimé à Saint-Nicolas-de-Port par Jean Jacobi
(Bibliothèque municipale de Besançon)

Pour commémorer son succès, René II édifia un sanctuaire appelé Notre-Dame de la Victoire ou de Bonsecours dès 1484 sur le terrain même où se déroula le combat ; Olry de Blâmont, évêque de Toul la consacra en 1498. La cité de Saint-Nicolas-de-Port se dota également d’une magnifique basilique dès 1480, signe de la dévotion de René II qui participa financièrement à son édification.

LA BATAILLE DE NANCY - 5 janvier 1477
 Gravure sur bois rappelant la victoire de la Bataille de Nancy par Daniel Meyer 1976 ! 
(Collection privée)

*

Comme le souligna Pierre de Ram au XIXe siècle dans son Histoire des chroniques liégeoises au temps de Charles le Téméraire : « le duc perdit son trésor à Grandson, son honneur à Morat et la vie à Nancy ». A Nancy, comme à Héricourt et Morat, la bataille se déroula suivant trois axes : surprise, panique et massacre. La supériorité numérique des coalisés eut raison des Bourguignons.

La puissance bourguignonne s’éteignit après plus d’un siècle d’histoire orgueilleuse le 5 janvier 1477 à Nancy. Le Grand Duc mort, le rattachement de son duché à la couronne de France, théoriquement effectué le 31 janvier 1477, a en fait demandé une conquête marquée notamment par les soulèvements populaires de Dijon (1477), de Beaune et de l’Auxois (1478).



Olivier PETIT

Historien médiéviste

Créateur et administrateur des blogs


et la France Médiévale (http://lafrancemedievale.blogspot.fr)





Sources historiques:

Pierre de BLARRU, La Nancéide ou la Guerre de Nancy, traduction de F. Schütz, 1840.

Pierre de BLARRU, La Nancéide, poème consacré à la victoire remportée devant Nancy par le duc de Lorraine René II sur le duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, le 5 janvier 1477, traduction de Jean Boës - (Collection "Etudes anciennes 32") - Editions De Boccard - 2006
Différentes chroniques

Bibliographie sélective :
 

La bataille de Nancy, catalogue de l’exposition 1477-1977, Musée Historique Lorrain.
Cinq centième centenaire de la bataille de Nancy 1477, Actes du colloque, 1977, Université Nancy II.
P. FREDERIX, La mort de Charles le Téméraire, Gallimard, 1971.
O. PETIT, La bataille de Nancy. Nouvelle Revue Lorraine - Décembre 2016-Janvier 2017
O. PETIT, La bataille de Nancy. Histoire antique et médiévale. Ed. Faton - Janvier-Février 2017 
C. PFISTER, Histoire de Nancy, Paris 1902-1909.  

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Copyright - Olivier PETIT - Patrimoine de Lorraine - 2011-2017 © Tous droits réservés

jeudi 5 janvier 2017

540e Anniversaire de la Bataille de Nancy (5 janvier 1477)

En ce jour du 540e anniversaire de la bataille de Nancy qui opposa, le 5 janvier 1477,
le duc René II de Lorraine à Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, je vous invite à lire
mon article qui vous permettra de comprendre les tenants et aboutissants de cet affrontement.

En cliquant sur la photo ci-dessus !
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http://patrimoine-de-lorraine.blogspot.fr/2011/01/la-bataille-de-nancy-5-janvier-1477.html
 Combattants lorrains. Reconstitution de la Compagnie Médiévale
"La Massenie de Saint-Michel" de Saint-Mihiel. Blâmont 7 juillet 2003.

 Pour ceux qui veulent avoir deux versions "papier" de mon article, vous pouvez acheter
le dernier numéro d'Histoire Antique et Médiévale (Janvier-Février 2017)

http://www.histoire-antique.fr/numero-89/brutus-personnage-historique-mythe-realite.4630.php

ou le numéro de décembre 2016-Janvier 2017 de la Nouvelle Revue Lorraine

http://www.nouvelle-revue-lorraine.fr/wp-content/uploads/2016/11/couv-12-2016-01-2017.jpg 
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mardi 5 juillet 2011

ARNAUD-GUILHEM DE BARBAZAN, UN SEIGNEUR AU SERVICE DE RENE 1er DE LORRAINE

En complément de la bataille de Bulgnéville, précédemment évoquée,
il me semblait utile de vous proposer une petite biographie d'Arnaud-Guilhem
de Barbazan qui tenta, vaillamment, de sauver la Lorraine

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Article remanié  pour l'occasion, dont une première version
est parue en complément de l'article sur la bataille de Bulgnéville
dans la revue Histoire Médiévale, des Éditions Harnois
en novembre 2001
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Arnaud-Guilhem, seigneur de Barbazan
Le chevalier sans reproche qui apporta son soutien au duc de Lorraine
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Arnaud-Guilhem de Barbazan
(Gravure du gisant se trouvait dans l'abbatiale de Saint-Denis)

Principal conseiller militaire de René d’Anjou pendant la bataille de Bulgnéville, Arnaud-Guilhem de Barbazan était un capitaine expérimenté et estimé de ses adversaires. Le célèbre chroniqueur bourguignon, Olivier de la Marche, présenta d'ailleurs le seigneur de Barbazan comme "le chevalier sans reproche" ; c'est tout dire sur ses états de service guerriers !

Au service des ducs Louis d’Orléans et Jean de Berry.

Originaire de Bigorre, dans les Hautes-Pyrénées, et faisant partie de cette noblesse du Sud-Ouest fidèle au duc d’Orléans (depuis la fin du XIVe siècle), Arnaud-Guilhem, fils de Regnaut de Barbazan, fut dès son plus jeune âge formé au métier des armes et s'avéra être doué pour cela. Il participa très jeune, à l’âge de dix-huit ans, à une expédition contre les Musulmans.

De retour de "croisade", il se mit alors au service du duc Louis 1er d’Orléans (1372-1407) comme son père avant lui. En avril 1402, il eut l'immense honneur de devenir chambellan du prince et le mois suivant, il participa, en compagnie de six autres chevaliers français, au combat de Montendre en Guyenne qui les opposa à sept chevaliers anglais. Les Français l'emportèrent, montrant ainsi le prestige de la chevalerie française. Pour les remercier de cette victoire, le duc d’Orléans organisa un grand festin à Paris.

En janvier 1404, Arnaud-Guilhem de Barbazan fut envoyé en Lombardie avec un contingent d’écuyers gascons. A la tête du gouvernement royal, le duc d’Orléans plaça ses fidèles à des postes clefs de l’administration et nomma, en 1405, Arnaud-Guilhem de Barbazan, sénéchal d’Agenais.

A la mort de Louis d’Orléans, en novembre 1407, le seigneur de Barbazan se mit tout naturellement au service du duc Jean de Berry, chef des « Armagnacs ». Pendant plus de dix ans, il fut l’un des principaux capitaines, en combattant les Bourguignons en Berry en 1411 et les Anglais en Poitou et en Guyenne en 1412.

En 1417, le seigneur de Barbazan défendit vaillamment la cité de Corbeil contre les assaillants bourguignons.

Le dauphin fait appel à lui.

A la mort du comte d’Armagnac, Bernard VII, assassiné en 1418 par les hommes de Jean Sans Peur, il se rangea au côté du dauphin Charles de France, futur Charles VII. Le 1er juin 1418, il tenta de reprendre Paris aux Bourguignons en vain ! Ensuite, il se rendit en Poitou et en Touraine où il reçu le capitanat de Lusignan. Pour mener à bien sa mission, le dauphin lui confia une compagnie composée de 240 hommes d’armes et 240 hommes de trait (archers et arbalétriers).

Dès lors, Arnaud-Guilhem de Barbazan devint le principal conseiller militaire et le premier chambellan du dauphin. De 1418 à 1419, il participa activement aux négociations entre Bourguignons et Français.

Après le traité de Pouilly-le-Fort (11 juillet 1419) entre Jean Sans Peur (1404-1419), le duc de Bourgogne et Charles, le dauphin de France, Arnaud-Guilhem de Barbazan refusa la somme de 500 moutons d’or que souhaitait lui offrir le duc de Bourgogne. Ce refus était motivé par l’assassinat de ses deux anciens maîtres le duc Louis 1er d’Orléans (1392-1407) et le connétable de France, Bernard VII d’Armagnac (1391-1418).

Avec l’assassinat du duc Jean 1er de Bourgogne sur le pont de Montereau le 10 septembre 1419, Barbazan fut immédiatement soupçonné. Il s'en défendit et il clamât son innocence. Pour échapper à la vindicte bourguignonne, il s'enfuit !

 Assassinat de Jean Sans Peur sur le Pont de Montereau
(enluminure du XVe siècle - BNF)

La prison.

Dès la fin juillet 1420, Arnaud-Guilhem se trouvait à Melun où il défendit la ville contre les troupes anglo-bourguignonnes du roi Henri V d’Angleterre (1413-1422) et du duc Philippe III de Bourgogne (1419-1467) (un traité d’alliance fut signé entre les royaumes le 21 mai 1420). Le siège s’acheva le 17 novembre 1420 par la reddition de la ville et la capture d'Arnaud-Guilhem de Barbazan. Ce dernier fut emmené à Paris pour d’y être jugé comme meurtrier du duc Jean Sans Peur. Il avoua, évidement, sous la torture, puis se rétracta en clamant haut et fort son innocence. La sentence tomba, il fut incarcéré pendant six ans. Une enquête fut cependant ouverte par le Parlement de Paris pour déterminer le vrai coupable.

Estimant qu'Arnaud-Guilhem de Barbazan était trop précieux pour le parti français, les Anglais souhaitant le garder le plus longtemps possible ; ils acceptèrent de fixer une rançon conséquente qu’en 1425 (elle s’élevait alors à 32 000 saluts d’or).

Ne pouvant faire face tout seul à une telle rançon, le 14 mars 1426, le roi Charles VII ordonna que la somme de 6 000 livres lui soit envoyée dans les plus brefs délais.

La somme demandée par les geôliers de Barbazan n'arrivant pas, ils décidèrent de déplacer leur prisonnier au château de Château-Gaillard où il connut une détention plus pénible.

Une libération inespérée.

En février 1430, le capitaine Étienne de Vignolles (1390-1443), dit La Hire, prit Château-Gaillard en profitant d'une négligence. En effet, en escaladant les parois de la forteresse, les hommes de La Hire purent pénétrer dans la forteresse sans être repérés et libérèrent Arnaud-Guilhem de Barbazan. Celui-ci se porta immédiatement auprès du roi Charles VII de France, en résidence à Sully-sur-Loire.

Reprenant sa place au conseil, il fut institué gouverneur de la Champagne et, en récompense de ses précieux services, le roi de France lui octroya la somme de 2 000 livres.

Le nouveau gouverneur de la Champagne s'associa ensuite au duc René d'Anjou, pour mener de rudes campagnes militaires en Champagne et en Bourgogne.

Bulgnéville, la fin.

Connaissant bien Arnaud-Guilhem de Barbazan depuis qu’ils avaient combattus ensemble par le passé, René d’Anjou, devenu duc de Lorraine, fit immanquablement appel à lui pour l’aider dans son différend l’opposant au comte de Vaudémont, féroce compétiteur et allié des Bourguignons. La bataille qui se produisit, le 2 juillet 1431, tout près de Bulgnéville scella le destin des deux hommes.

Les troupes ducales de René 1er de Lorraine connurent, en effet, une défaite mémorable où le seigneur de Barbazan y fut grièvement blessé en tentant, vainement, de disloquer les rangs bourguignons.

Barbazan fut alors transporter dans une maison de Bulgnéville où il décéda. On peut d'ailleurs voir, dans la rue de Bulgnéville qui porte son nom, une stèle commémorative posée à l'emplacement de cette maison.

En 1457, le roi Charles VII fît transporter les restes de Barbazan à la Chapelle de la Vierge à Saint-Denis et fit mettre son tombeau près de celui des monarques français, après lui avoir rendu les honneurs qu'il méritait !


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Arnaud-Guilhem de Barbazan restera dans les mémoires comme l'un des plus valeureux seigneurs fidèles au parti français en tentant de contrecarrer, à Bulgnéville, les prétentions du parti bourguignon. Ce chevalier "sans reproche" méritait bien une place particulière dans l'histoire de France et de la Lorraine.

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lundi 10 janvier 2011

LE DUC RENE II DE LORRAINE

Je vous propose aujourd'hui, en complément de l'article sur la bataille de Nancy, une biographie
du duc René II de Lorraine, que j'ai écrite et qui est parue dans
la revue Histoire Médiévale en 2004.

Bonne lecture...

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René II duc de Lorraine
Le prince qui défia le puissant duc de Bourgogne

Statue équestre de René II au Musée Lorrain de Nancy  (œuvre en plomb de Nicolas Lépy)
Statue équestre de René II au Musée Lorrain de Nancy
(œuvre en plomb de Nicolas Lépy)

Petit-fils de René d’Anjou (qui affronta, sans succès, les Bourguignons à Bulgnéville le 2 juillet 1431) , René II de Lorraine vit le jour à Angers le 2 mai 1451. Fils aîné de Ferry de Lorraine comte de Vaudémont, baron de Joinville, sénéchal héréditaire de Champagne et de Yolande d’Anjou (fille de René), il passa toute sa jeunesse à la cour de son grand-père, en Provence et en Anjou. Ce prince avait cinq frères et sœurs : Nicolas, seigneur de Joinville et de Bauffremont ; Pierre ; Jeanne, femme de Charles d’Anjou comte du Maine ; Marguerite, épouse de René duc d’Alençon et Yolande, femme de Louis Landgrave de Hesse.

En 1463, à la fin du printemps, René d’Anjou fit jouer au château de Bar la « Farce des Pastoureaux » pour ses petits-enfants présents. En 1470, le jeune homme accompagna le duc de Lorraine dans ses déplacements notamment à Vézelise en juin.

Succédant à son oncle, Jean de Lorraine au début de l’année 1473 en tant que Capitaine d’Angers, Sénéchal et Gouverneur d’Anjou, René de Lorraine obtint donc de son grand-père René d’Anjou les gages associés à ces différentes fonctions en février.

"Le duc René II de Lorraine agenouillé et priant devant la Sainte Vierge à l'Enfant"
Heures de René II, Maître François, Paris, entre 1473 et 1479. Lisbonne,
Musée Gulbenkian, Ms LA 147, f°10. © Lisbonne, Musée Gulbenkian.


Une mort subite bouleverse son destin.

En juillet 1473, l’éphémère duc de Lorraine Nicolas d’Anjou décéda laissant son cousin René dans un grand désarroi. Yolande d’Anjou devint alors duchesse de Lorraine situation qui ne durera pas puisqu’elle préféra laissé le duché entre les mains de son fils le 2 août de la même année, en se réservant cependant l’usufruit. René II, duc de Lorraine fit son entrée officielle à Nancy le 4 août.

"Le duc René II entouré de ses troupes"  Miniature du manuscrit "La Nancéide" de Pierre de Blarru. 1518.  (Bibliothèque municipale de Besançon)
"Le duc René II"
Miniature du manuscrit "La Nancéide" de Pierre de Blarru. 1518.
(Bibliothèque municipale de Besançon)

Rapidement après son accession au pouvoir, le jeune duc fut sollicité par les deux grands princes européens : Louis XI, roi de France et Charles le Téméraire, duc de Bourgogne. Le but de leurs manœuvres était de contracter une alliance. René II privilégia d’abord le roi de France en scellant avec lui le traité de Neufchâteau le 27 août 1473 ; en agissant de la sorte le duc de Lorraine n’obtint cependant pas de sérieuses garanties de la part du souverain. En proie à des difficultés financières, le duc demanda à son allié de lui prêter la somme de 20.000 livres. Il reçut un refus catégorique ce qui le poussa à se tourner vers le rival du roi de France, Charles le Téméraire. En effet, se sentant profondément bafoué, René II s’entendit alors avec le duc de Bourgogne lors du traité de Nancy, le 15 octobre 1473. Charles le Téméraire obtint le droit de placer des garnisons dans les châteaux lorrains de Darney, Epinal, Amance, Neufchâteau et Prény, créant ainsi une ligne de communication qui lui permettait de rallier le Luxembourg et la Bourgogne, le tout en territoire lorrain.

Un duc de Bourgogne trop pressant.

René II ne pouvait plus supporter les agissements de Charles le Téméraire, pour qui la Lorraine représentait le territoire idéal qui lui manquait pour créer un grand territoire, un royaume médian dont il serait le prince. Des convois d’hommes et de marchandises traversaient son pays ; des bandes de mercenaires venant du Nord pillaient, brûlaient et tuaient les habitants de cette Lorraine à laquelle il était attaché. Le duc n’en pouvait plus.

Renonçant à son alliance avec Charles le Téméraire, le 9 juillet 1474, René II adhéra à la ligue formée par Louis XI, l’empereur, les princes allemands, les villes d’Alsace et les cantons suisses. Le 15 août suivant, le roi de France l’assura de son aide en cas d’attaque bourguignonne.

Après un court séjour dans les Vosges, notamment à Neufchâteau, Mirecourt et Dompaire, René II vint prendre possession du duché de Bar que lui a confié René d’Anjou, au cours du mois de novembre 1474.

Vitrail montrant René II en prière  Œuvre attribuée à Valentin Bousch  Basilique de Saint-Nicolas de Port
Vitrail montrant René II en prière
Œuvre attribuée à Valentin Bousch
Basilique de Saint-Nicolas de Port

Après avoir défié le duc de Bourgogne par l’intermédiaire de son héraut, le 9 mai 1475, le duc de Lorraine scella un traité d’alliance avec l’empereur le 17 mai. Peu de temps après, René II ne put empêcher les troupes bourguignonnes (environ 40 000 hommes) de pénétrer en Lorraine et de s’accaparer tous les châteaux sauf celui de Prény qui résista aux assauts. Le 30 novembre, Charles le Téméraire fit son entrée dans la cité de Nancy. Entre temps, une paix de neuf ans fut signée entre le roi de France et le duc de Bourgogne ; et un traité scellé entre le même duc et l’empereur.

Mécontent de la tournure des évènements et fortement résolu à ne pas se laisser faire, le duc de Lorraine constitua une force armée dans les Vosges avec les nobles lorrains restés fidèles ainsi qu’avec des mercenaires suisses venant de différents cantons. Mais les choses ne se passèrent pas si facilement et René II fut contraint de quitter le bailliage des Vosges car sa personne était sérieusement menacée. Il rendit alors à Joinville vers la fin de l’année 1475. Au cours de l’hiver 1475-1476, le duc de Lorraine manda deux émissaires en Suisse afin de recruter de nouvelles troupes. En avril 1476, ayant eut vent de la cuisante défaite bourguignonne à Grandson le 2 mars précédent, il envisagea immédiatement de reprendre le combat. De passage en Suisse où il tenta de convaincre les cantons de l’aider dans sa tache de reconquête de ses territoires, il prit part à la fameuse bataille de Morat, le 22 juin où le duc de Bourgogne fut défait.

La déconfiture du grand prince provoqua une virulente réaction en Lorraine de la part des habitants qui commencèrent la lutte, reprenant aux garnisons bourguignonnes plusieurs forteresses dont Vaudémont. René II put faire son entrée à Saint-Dié le 21 juillet et à Epinal le lendemain. Il entreprit peu après le siège de la forteresse de Châtel-sur-Moselle et de la cité Nancy ; cette dernière capitula le 8 octobre.

Un duché de Lorraine retrouvé.

"Le duc René II à la bataille de Nancy, 5 janvier 1477"  Miniature du manuscrit "La Nancéide" de Pierre de Blarru. Fin XVe siècle.
"Le duc René II à la bataille de Nancy, 5 janvier 1477"
Miniature du manuscrit "La Nancéide" de Pierre de Blarru. 1518.

Le duc de Lorraine ne savoura pas longtemps la prise de sa capitale puisque les troupes du duc de Bourgogne y vinrent mettre le siège le 21 octobre. René II préféra quitter sa chère cité pour aller chercher de l’aide en Alsace, notamment à Sélestat où il séjourna le 1er décembre. Ayant pu convaincre les Alsaciens et les Suisses de l’aider dans sa tâche de recouvrir définitivement son duché, René II passa le 4 janvier 1477 à Saint-Nicolas-de-Port et se dirigea en direction de sa cité ducale. Le 5 janvier, les troupes bourguignonnes furent défaites par une forte coalition au cours de la bataille de ou plutôt pour Nancy. Le grand duc d’Occident, Charles le Téméraire y trouva misérablement la mort.

"Le duc René II entouré de ses troupes"  Miniature du manuscrit "La Nancéide" de Pierre de Blarru. 1518.
"Le duc René II entouré de ses troupes"
Miniature du manuscrit "La Nancéide" de Pierre de Blarru. 1518.
(Bibliothèque municipale de Besançon)

René II sortit inévitablement grandi de ce conflit qui d’ailleurs aurait pu définitivement lui coûter son duché. Fin janvier 1477, il réunit les États Généraux de Lorraine puis se rendit auprès du roi de France Louis XI qui le félicita grandement.

La statue équestre de René II de Lorraine  Bronze de Mathias Schiff - 1883  Nancy - Place Saint-Epvre
La statue équestre de René II de Lorraine
Bronze de Mathias Schiff - 1883
Nancy - Place Saint-Epvre
La statue équestre de René II de Lorraine  Bronze de Mathias Schiff - 1883  Nancy - Place Saint-Epvre

Un héritage convoité.

A partir de mars 1477, le duc de Lorraine envisagea de s’assurer la possession de tous les biens de son grand-père, René d’Anjou. En effet, les duchés d’Anjou, de Bar, les comtés du Maine, de Provence et le royaume de Sicile faisaient partie de l’héritage de son aïeul mais s’était sans compter sur le roi de France qui entendait s’accaparer ces territoires.

Pendant que René II se rendait en Provence, les espions de Louis XI sillonnèrent son duché à l’affût de la moindre information le concernant. Ne pouvant rentrer dans ses États, le duc s’embarqua à Marseille le 25 novembre 1480 direction Venise où il arriva le 13 mars. Admis le 16 avril comme patricien de la cité des Doges, il scella un traité avec le doge Jean Mocenigo dans lequel il s’obligeait à venir défendre la république vénitienne en compagnie de 500 cavaliers et 1 000 hommes d’armes en cas de péril.

Venise - Le campanile de la Place San Marco  avec à sa gauche le Palais des Doges
Venise - Le campanile de la Place San Marco
avec à sa gauche le Palais des Doges

Au cours de l’année 1481, René II put enfin revenir en Lorraine en passant par la Suisse.

Entre temps, Louis XI avait intégré l’Anjou, le Maine et la Provence au royaume de France sans que le duc de Lorraine ne puisse s’interposer.

La guerre de Ferrare et ses déboires avec la royauté.

Le 3 mai 1482, la république de Venise déclara la guerre à Ercole d’Este, duc de Ferrare et partisan de Ferrante d’Aragon, usurpateur du royaume de Sicile, alors possession de la Maison d’Anjou. René II décida quelques après d’apporter sa précieuse aide au doge mais ne quitta sa bonne cité ducal de Nancy que le 11 mars 1483, en compagnie d’un bon nombre de seigneurs lorrains et de l’évêque de Verdun. En passant par la Suisse, le duc de Lorraine recruta de nombreux mercenaires lui permettant de porter à 200 cavaliers et à 1 000 fantassins son corps expéditionnaire. Il est reçu en grande pompe par le doge de Venise le 13 avril.

Après une brillante victoire sur Ercole d’Este et ses troupes le 20 avril, René II, fraîchement nommé capitaine général des troupes vénitiennes, entreprit le siège de la cité de Ferrare. Davantage préoccupé par le sort de la Sicile, le duc de Lorraine laissa le soin d’achever la prise de Ferrare au bâtard de Calabre. Il se retira donc à Padoue afin d’organiser l’expédition sicilienne mais en apprenant la mort du roi de France Louis XI, qui intervint le 8 septembre, il préféra s’en retourner en Lorraine dès le 22 septembre avant de se rendre auprès d’Anne de Beaujeu, la défunte reine et de Charles VIII, le tout jeune roi.

René II n’arriva à Blois que le 25 octobre où l’attendait la régente Anne de Beaujeu. Désirant se l’attacher, la reine de France lui restitua le Barrois, occupé jadis par Louis XI et lui proposa même d’épouser Philippe de Gueldre, ce qu’il fit d’ailleurs mais nous en reparlerons.

René II  Nancy - Porte de la Craffe
René II
Nancy - Porte de la Craffe

Le 27 juillet 1486, René II adressa une virulente protestation à la régente du royaume au sujet du rattachement définitif du duché d’Anjou et du comté de Provence alors qu’elle avait promis d’essayer de l’aider à récupérer ses droits sur ces deux principautés. Afin d’apaiser sa haine, Anne de Beaujeu le nomma Grand Chambellan et lui promit de lui fournir troupes et argents dans l’optique d’une nouvelle expédition en Sicile.

Apprenant qu’une révolte avait éclatée en Sicile contre le pouvoir de Ferrante d’Aragon au début de l’année 1488, René II se félicita de cet événement et rassembla ses troupes afin de reconquérir la terre de ses ancêtres. Mais, il ne pourra pas mener à bien son dessein car le roi de France Charles VIII lui intima l’ordre de s’en retourner en Lorraine puisqu’il envisageait lui-même de conquérir ce royaume de Sicile. Dépité, le duc obtempéra et fut également à cette occasion déchu de son commandement de la compagnie de Cent Lances et de la pension de 36 000 livres accordés en 1484.

"Le duc René II entouré de ses fidèles"
Jacques de Cessoles. LE jeu des échecs moralisés". BNF. Département des manuscrits.

René II ne comptait pas en rester là et revendiqua de nouveau le comté de Provence. Charles VIII lui accorda une nouvelle pension de 24 000 compensatrice, le 22 mai 1497.

Après la mort du souverain français le 7 avril 1498, le duc de Lorraine assista naturellement au sacre de Louis XII auquel il rend hommage pour le Barrois mouvant. Les relations avec le nouveau roi ne seront pas toujours au beau fixe car le duc essaya à maintes reprises de récupérer certaines terres lui ayant appartenues par le passé, comme celle de Gondrecourt.

Deux mariages.

Le duc de Lorraine René II se maria à deux reprises. Le 9 septembre 1471 il épousa Jeanne d’Harcourt, fille de Guillaume d’Harcourt, comte de Tancarville et de Yolande de Laval. Comme Jeanne ne put lui donner des enfants, il la répudia en 1475. Après une enquête de l’Official de Toul, une assemblée de religieux et de juristes annula enfin le mariage le 8 août 1485, soit dix années après la répudiation ducale. En guise de dédommagement, Jeanne d’Harcourt reçut à partir de juin 1486 une rente annuelle de 2 000 livres.

Le duc René II de Lorraine et la duchesse Philippe de Gueldre avec leurs fils.   Vita Christi par Ludolphe le Chartreux. 1506.   Bibliothèque Municipale de Lyon, manuscrit ms 5125, folio 3v.
Le duc René II de Lorraine et la duchesse Philippe de Gueldre avec leurs fils. 
Vita Christi par Ludolphe le Chartreux. 1506. 
Bibliothèque Municipale de Lyon, manuscrit ms 5125, folio 3v.
Ce fut à Blois que René II rencontra et épousa en secondes noces Philippe de Gueldre nièce de la reine Anne de Beaujeu. Philippe était alors la fille d’Adolphe d’Egmont, duc de Gueldre et de Catherine de Bourbon. Un contrat de mariage fut signé le 28 août 1485 et le 1er septembre l’union fut célébrée à Orléans. De cette union naquirent douze enfants : Charles (né en 1486 et décédé jeune), François (né et mort le 5 juillet 1487), Antoine (né le 4 juin 1489, succèdera à son père), Anne (née en 1490 et décédé l’année suivante), Nicolas (né en 1493 et mort en bas-âge), Isabelle (née en 1494 et décédée avant 1508), Claude (né en 1496 et mort en 1550. Auteur de la branche des ducs de Guise de la Maison de Lorraine), Jean (né en 1498 et décédé en 1550. Cardinal-Diacre), Louis (né en 1500 et mort en 1528. Evêque de Toul puis abbé de Saint-Mihiel, devient comte de Vaudémont), Claude et Catherine (nées en 1502) et François (né en 1506 et décédé à la bataille de Pavie en 1525).

Philippe de Gueldre.  Peinture sur bois - Début XVIe siècle.  Musée Lorrain.
Philippe de Gueldre.
Peinture sur bois - Début XVIe siècle.
Musée Lorrain.

Gisant de Philippe de Gueldre, seconde épouse de René II (morte en 1547)  Œuvre de Ligier Richier  Nancy - Église des Cordeliers
Gisant de Philippe de Gueldre, seconde épouse de René II (morte en 1547)
Œuvre de Ligier Richier
Nancy - Église des Cordeliers

René II, un humaniste avisé.

Le nouveau palais ducal reconstruit peu après la bataille de Nancy ne fut pas sa seule résidence, il résida tantôt à Bar-le-Duc, Pont à Mousson, Gondrecourt ou Lunéville… La cour ducale le suivait partout où il se rendait et se composait en premier de la famille ducale, de nobles, écuyers, apothicaires, médecins, nourrices, serviteurs, fous et musiciens.

A l’instar de la cour royale de France, celle de René II offrit un certain raffinement. Dès 1480, des spectacles inédits furent proposés à l’assistance, avec la mise en scène d’animaux exotiques en provenance d’Afrique, comme des lions par exemple. Des combats entre fauves et taureaux furent ainsi offert à cette cour ducale. La cour fut également le cadre d’un développement artistique et littéraire. Le mécénat ducal permit notamment aux peintres de s’exprimer pleinement ; Georges Trubert en tête. Collectionneur et humaniste avisé, le duc de Lorraine introduisit ainsi la Renaissance en Lorraine.

Une partie de chasse décisive.

Dès le 21 juillet 1482, René II avait fait rédiger un premier testament au moment où il se rendait en Italie. Le second testament qui intervint le 25 mai 1506, stipulait que les duchés de Lorraine et de Bar et le marquisat de Pont-à-Mousson seraient à jamais réunis sous un même gouvernement et que seul un homme pourra exercer le pouvoir.

Au cours de l’automne 1508, René II participa à une partie de chasse non loin du château de Fains, dans le Barrois. Ne s’étant pas suffisamment couvert, le duc de Lorraine prit froid. Rentré au château, le prince fut prit de malaises et peu à peu son état empira. Le 10 décembre, il fut retrouvé inanimé dans son lit. Un grand prince venait de mourir.

Détail de l'enfeu du Duc René II de Lorraine  Œuvre du sculpteur Mansuy Gauvin (mort en 1542)  réalisé en 1509  Nancy - Église des Cordeliers
Détail de l'enfeu du Duc René II de Lorraine
Œuvre du sculpteur Mansuy Gauvin (mort en 1542)
réalisé en 1509
Nancy - Église des Cordeliers

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L’église des Cordeliers de Nancy, situé à côté du palais ducal, reçut la dépouille du bon duc René II. Dans les églises de la cité ducale comme dans celles du duché furent célébrées des messes en l’honneur du prince qui défia le grand duc d’Occident, Charles le Téméraire en le terrassant à la bataille pour Nancy.

Nancy - La nef de l'église des Cordeliers
 Nancy - La nef de l'église des Cordeliers
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Bibliographie sélective :

Paul MARICHAL, René II duc de Lorraine et les possessions de la Maison d’Anjou dans le Maine, 1909.
Paul MARICHAL, René II duc de Lorraine et le domaine de Jeanne de Laval, in Mémoires de la Société des Lettres, Sciences et Arts de Bar-le-Duc, 3e série, Tome III, pp. 65 à 96.
Michel PARISSE, Noblesse et Chevalerie en Lorraine médiévale, PUN, 1982.
Georges POULL, La Maison ducale de Lorraine, PUN, 1991.
René DE VIENNE, René II et Venise 1480-1483, in Le Pays Lorrain, n°3, 1977, pp. 135 à 139.

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René II défie Charles le Téméraire

Le 9 mai 1475, le héraut Lorraine se présenta au duc de Bourgogne qui assiégeait la ville de Neuss, située dans l’électorat de Cologne, afin de lui remettre une lettre de défi de son maître.

La rencontre entre le héraut et le prince fut relaté par un chroniqueur en ces termes :

« Premierement, l’entree et reverence faite en forme de supplication, comme il s’en suyt :

Tres haut, tres excellent et tres illustre prince, salut, honneur et tres humble reverence a vostre magnifique haultesse de la parte de tres hault, tres puyssant et mon souveraing seignor le duc de Lorrayne, Regnier second de ce nom. Je suis envoye comme son tres humble et tres obeyssant herault d’armes, affin de vous dire et exposer ce qu’il m’est enjoint et ordonné de faire.
Et pour ce que je n’oseroye ne voldroye moy presumer ne ingerer de declarer madite charge, sans prealablement vous supplyer moy donner audience et licence de faire ce qu’il m’est ordonné, protestant de non proceder plus avant que vostre bon vouloir a ce vouldra accorder.

Response faite pas ledit duc Charles :

Hérault, vous dirès ce que vous avès de charge de vostre maystre, et de ce que dirès en ayès mémoire pour en certiffier, comme il appartient au degré de vostre office.

L’exposition de la charge dudit herault ayant son bonnet affoyble come celuy qui parle en la bouche de son maystre, vestu de sa coste d’armes :

Toy, Charles, duc de Bourgoygne, de la parte de tres hault, tres puyssant et tres redouté prince monseigneur le duc de Lorrayne, mon tres redoubté et souveraing seignor, je te nonce deffiance aufeuet a sang contre toy, tes apyes, subjects et alliés, et autre charge je n’ay de proceder plus avant

Response par ledit duc Charles audit herault, enparlant comme a son maystre :

Herault j’ay ouy et entendu l’exposition de ta charge, par laquelle tu m’as donné matiere de joye. Et pour toy donner et demonstrer que le cas est tel, tu vestiras ma robe avec ce present don, et diras a ton maystre que je me trouveray de brief en son pays. Et la plus grande crainte que j’ay, c’est de ne point trouver. Et affin que tu ne craignes de ton retourne, je ordonne au marreschault de mon oste, à Toison d’Or, roy d’armes de mon ordre, qu’ils te convoyent a bonne seurté. Car je seroys marry sy tu ne faisaois ton report devers ton maystre, comme il apartient a bon et loyal officier d’armes.

Le present que fist le duc Charles au herault d’armes :

A la despesche dudit officier d’armes fut delivree la robe de drap d’or que pour lors avoit vestu, et avec ce ungne coupe d’argent dorée en laquelle il y avoit cinq cents lyons d’or ».

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Les armoiries de René II de Lorraine en détail

armoiries de René II de Lorraine


Le Duc de Lorraine portait le titre de Rois de Jérusalem, de Naples, de Hongrie et d'Aragon, de Ducs d'Anjou, de Bar, de Gueldre et de Juliers. On trouve sur ses armoiries:
- Au centre trois alérions: aiglons sans bec, ni pattes, aux ailes déployées, représentant la Maison de Lorraine.
- Au dessus la Croix des Rois de Jérusalem.
- Les fleurs de Lys de Naples.
- A gauche les armoiries de la Hongrie.
- A droite celles d'Aragon.
- Au bas les fleurs de lys d'Anjou.
René II y ajouta la croix de Lorraine à double traverse
et le chardon après la bataille de NANCY.

Blason de René. AD Meuse, cote 4 H 114
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Des liens internet utiles :

Sur
wikipedia

René II le Victorieux sur

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